Transmission
Préparés à céder

Emmanuelle Perrussel
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Plusieurs rendez-vous ont été donnés ces dernières semaines aux agriculteurs de plus de 56 ans. L’occasion pour eux de commencer à penser à leur départ à la retraite et à l’avenir de leur exploitation.

Préparés à céder

Cesser son activité et transmettre son exploitation sont des enjeux majeurs à mesure qu’approche l’heure de la retraite pour les agriculteurs. Ainsi depuis plusieurs années, la chambre d’agriculture du Rhône et la MSA Ain-Rhône, en partenariat avec le service juridique de la FDSEA, organisent des journées à l’attention des exploitants de plus de 56 ans.

Deux demi-journées d’informations à Cublize et deux demi-journées à Saint-Martin-en-Haut se sont tenues ces dernières semaines Ainsi qu’une journée le vendredi 10 décembre. Les interventions ont porté soit sur le thème « Préparer sa retraite » avec Corinne Gelin ou Nicole Thivard, conseillères en protection sociale agricole à la MSA Ain-Rhône, soit sur « Les aspects juridiques de la cessation et de la transmission en agriculture » par Élise Lemoine, juriste à la FDSEA, après une introduction de Rémi Demazoin, conseiller transmission au Point Accueil Transmission de la chambre d’agriculture sur « Cesser son activité agricole, transmettre son exploitation : un projet qui se prépare ».

Le conseiller transmission à la chambre d’agriculture a commenté les grandes étapes de la transmission et détaillé les outils disponibles. Il a aussi invité chaque futur cédant à anticiper.

« S’ouvrir aux autres »

« Le cédant doit s’ouvrir aux autres, former et transmettre ses savoirs et savoir-faire, commencer à alléger sa charge de travail, maintenir un potentiel transmissible, amorcer la réflexion et analyser ses droits à la retraite. Cette phase doit se faire entre cinq et dix ans avant la transmission. En premier lieu, il faut penser au devenir de son exploitation et clarifier ses objectifs. Souhaitez-vous pérenniser l’exploitation, en la transmettant à votre conjoint, à vos enfants, à une personne hors cadre familial ? Ou alors, projetez-vous plutôt de la démanteler en vue de conforter d’autres exploitations ? Dans le cas d’une société, il s’agit de réfléchir au renouvellement de l’associé sortant et d’en discuter avec les autres associés. La question du lieu d’habitation est elle aussi cruciale », a énuméré Rémi Demazoin.

La communication est elle aussi essentielle : « en parler en famille, avec des personnes de confiance, avec les propriétaires de ses terrains… Il faut sortir de l’ambiguïté et poser clairement les choses avec son entourage, afin que chacun puisse avancer à son rythme dans sa réflexion. Par exemple, l’un de ses enfants peut avoir changer d’avis et finalement vouloir reprendre la ferme ou vice-versa » a ajouté le conseiller.

« Lever ses peurs »

Selon lui, tout cédant doit déterminer ce qu’il souhaite et pouvoir lever ses peurs. Certains ont notamment soulevé, lors de la journée cédants, qu’ils craignaient d’installer un jeune à leur suite et que ce dernier ne puisse pas vivre de son métier. D’autres encore n’ont pas confiance en leur capacité à donner des conseils à un agriculteur qui se lance… « Toutes ces interrogations émanent du ressenti propre à chacun à vous de les exprimer le plus objectivement possible. »

Ces phases de réflexion et d’échanges passées, place à l’enclenchement du processus entre cinq et trois ans avant la transmission. Il s’agit ici d’analyser les incidences fiscales et sociales, de définir les modalités de transmission, d’établir le calendrier et d’élaborer des scénarios. « Des experts tels que des conseillers de gestion, des juristes, des conseillers du point accueil transmission, du répertoire départ installation… peuvent vous aider à préciser la nature des biens à transmettre, les modalités et la date de cette transmission, les conditions d’accueil du futur repreneur », poursuit Rémi Demazoin.

La recherche de repreneur démarre entre trois ans et dix-huit mois avant. Cette phase sous-entend qu’il faut veiller à maintenir son outil de production, assurer sa pérennité, avoir procédé à l’évaluation des biens à transmettre et/ou des parts sociales, informer ses propriétaires bailleurs. Si aucun repreneur/successeur n’est en vue, c’est le moment de rechercher activement un repreneur ou un associé.

L’heure de la concrétisation arrive en général au cours des dix-huit derniers mois. Le repreneur est choisi, il faut envisager un passage de relai (stage test par exemple), accomplir les formalités (CFE, MSA...) et rédiger les baux.

Des aspects juridiques

Elise Lemoine, juriste, a présenté las aspects juridiques de la transmission. La question de la transmission des baux a bien entendu été évoquée. En effet, la plupart des exploitants ont bien souvent une part plus ou moins importante de leur terrain en location. Or que la transmission se passe en famille ou en dehors du cadre familial, un certain formalisme doit être respecté afin de sécuriser le foncier. Il a bien été rappelé que le bail rural verbal comme écrit n’est pas cessible en dehors du cadre familial.

La question de la transmission des biens de l’exploitation détenus en propriété a ensuite été débattue. Vente, location, donation… Tous ces termes ont été expliqués et chacun a pu exprimer son ressenti sur ces choix en fonction de sa sensibilité et de son histoire personnelle.

Chaque transmission est unique et présente des spécificités, il n’y a donc pas de formule magique et automatique. Il est donc important d’être bien entouré et surtout d’anticiper !

 

Des outils à disposition

Cette journée a aussi été l’occasion de présenter des outils à disposition des exploitants en projet de cession. Le Point Accueil Transmission de la chambre d’agriculture, ouvert à tous gratuitement, a pour missions d’accueillir, d’informer, d’orienter tous les agriculteurs qui envisagent de cesser leur activité, de transmettre leur exploitation. Il repose sur un accompagnement individuel dans la durée et aide à formaliser un projet et à proposer un plan d’action, selon les principes de confidentialité et de neutralité. Le Répertoire Départ Installation (RDI) favorise la transmission des exploitations hors cadre familial. Il est là pour mettre en relation des agriculteurs en recherche d’un repreneur, ou d’un associé, et des candidats. Un autre outil est le stage reprise en exploitation agricole (d’une durée de trois mois à un an). Ses objectifs sont de donner au repreneur une meilleure connaissance de l’exploitation et de l’environnement global, de tester l’entente avec son ou ses futurs associés, et le cédant peut transmettre son savoir-faire. En somme, il permet de préparer une transmission et une installation réussies.