énergie
Les restaurateurs investissent les méthaniseurs

Emmanuelle Perrussel
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Gaz réseau distribution de France (GRDF) a récemment organisé une conférence sur la structuration de la filière biodéchets en Île-de-France. Avec l’objectif d’anticiper la loi anti-gaspillage, qui rend obligatoire le tri des biodéchets pour tous dès le 1er janvier 2024.

Les restaurateurs investissent les méthaniseurs

« Rien ne se perd, rien se créé, tout se transforme ». Le chef Stéphane Martinez a fait sienne cette maxime du chimiste Antoine Lavoisier (1743-1794) puisqu’il collecte - avec l’entreprise Moulinot qu’il a fondée en 2014 – auprès de ses collègues restaurateurs, des cantines collectives (écoles, hôpitaux…) et même l’Élysée, tous les déchets alimentaires : coquilles d’œuf, de moules et d’huîtres, reliefs de repas, épluchures, marc de café etc. Invité à témoigner lors d’une conférence de presse organisée par GRDF, il a expliqué la genèse de son entreprise par la volonté que ce qui pouvait provenir de la terre pouvait y retourner, et qu’il était également possible de « transformer en énergie ». Depuis 2014, ce sont près de 50 000 tonnes de déchets qui ont été traités grâce à Moulinot. Le chef Guillaume Gomez, qui a travaillé pendant presque un quart de siècle dans les cuisines de l’Élysée, a été l’un de ses premiers clients.

Verdissement du mix énergétique


Dans l’absolu, ce sont 500 000 tonnes de déchets qui sont mobilisables, rien qu’en Île-de-France mais, aujourd’hui, les capacités de traitement sont limitées à 40 000 tonnes. Autrement dit, le solde (460 000 tonnes) repart soit à l’enfouissement soit à l’incinération. C’est pourquoi, en accord avec les restaurateurs et les agriculteurs-méthaniseurs, GDRF espère multiplier par cinq les volumes traités d’ici 2025. Pour parvenir à ces 200 000 tonnes, « il faudra passer des quatre méthaniseurs actuels qui valorisent les biodéchets à 18 », a affirmé Véronique Bel, directrice adjointe Clients Territoires Île-de-France chez GRDF. « Ils contribueront à atteindre l’objectif de 10 % de gaz vert injectés dans les réseaux gaz d’ici 2030, et 100 % d’ici 2050 », a-t-elle ajouté. De plus, le développement de cette filière va également contribuer au verdissement du mix énergétique des collectivités et à la décarbonation des transports, à travers le BioGNV, un carburant écologique et décarboné. GRDF se fixe d’ailleurs comme objectif, grâce à la méthanisation, de faire rouler 75 % des bus franciliens au biogaz d’ici 2029, soit 7 500 bus sur une flotte de 10 000.

Particuliers : tout reste à faire


Sur les 18 stations de méthanisation prévues, une première unité spécialisée dans les biodéchets, appelée Equimeth, doit être prochainement mise en service à Moret-Loing-et-Orvanne, près de Fontainebleau (Seine-et-Marne). Elle permettra chaque année de transformer 25 000 tonnes de matières organiques (issus de 400 cantines et restaurants du Pays de Fontainebleau) en gaz vert pour alimenter en énergie Moret-Loing-et-Orvanne et les communes voisines. Une autre unité, de taille plus modeste (8 000 tonnes) sera mise en service en septembre prochain à l’Ecolepôle de Carrières-sous-Poissy (Yvelines). Mais « il reste néanmoins les deux tiers des biodéchets alimentaires de ces activités professionnelles à capter », a indiqué Véronique Bel. Concernant les biodéchets des particuliers, tout reste à faire : seuls 2 % du gisement mobilisable sont aujourd’hui collectés !

Christophe Soulard