Syndicalisme
La souveraineté alimentaire menacée

Charlotte Favarel
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La FDSEA et les JA se sont mobilisés ces derniers jours autour du slogan « alimentation française, bientôt la faim… ?! ». Ils se sont notamment rendus chez plusieurs enseignes de la distribution à Villefranche-sur-Saône, Sainte-Foy-L’Argentière, Souzy, Vindry-sur-Turdine, Givors et Écully.

La souveraineté alimentaire menacée
Les opérations de stickage dans plusieurs enseignes de la distribution ont mis en évidence de nombreux produits dont la provenance est floue. Ce qui induit le consommateur en erreur. © EP/IAR

Relayant l’appel du réseau FNSEA et JA « alimentation française, bientôt la faim… ? ! », « on marche sur la tête !!! » et #AgriSousPression, les agriculteurs du Rhône se sont mobilisés le week-end du 18 et 19 novembre et le 21 novembre.

Des délégations de producteurs se sont données rendez-vous mardi dans plusieurs enseignes de la distribution : Casino, Carrefour, Colruyt, Leclerc et Intermarché. Ils ont notamment décidé de se faire entendre à propos de leurs revenus. « Ne laissons pas brader nos produits agricoles lors de négociations commerciales ! Demandons une application de la loi Égalim pour la prise en compte de nos coûts de production. Réclamons l’obligation de la mention de l’origine nationale à tous les produits alimentaires et exigeons de l’administration un respect du calendrier pour les paiements Pac ! ». Ils revendiquent également le droit de continuer à produire : « nous demandons l’arrêt de l’empilement des normes imposées par le Gouvernement et celui des interdictions de moyens phytos sans solutions. N’importons pas l’alimentation que nous ne voulons pas, avec des accords de libre-échange dévastateurs pour notre souveraineté alimentaire. Accompagnons plutôt les transitions par l’investissement, le conseil et une couverture des risques à la hauteur des enjeux et pas en élevant les loups au mépris des agriculteurs », selon le communiqué de presse des responsables de la FDSEA et des JA.

Opérations stickage

Parmi les points de ralliement de mardi, un groupe emmené par la FDSEA s’est rendu dans une enseigne de la grande distribution à Écully. Munis de stickers « produits importés = moins de souveraineté », ils ont vérifié la provenance et l’étiquetage de dizaines de produits. En entrant dans le magasin, quel n’a pas été leur agacement de voir une palette de taille conséquente contenant des bocaux de cardons d’Espagne, à des prix défiant toute concurrence. « C’est inadmissible de mettre ces produits en évidence alors que nous sommes dans la région du cardon ! », s’est insurgé le président de la FDSEA, Pascal Gouttenoire. Quelques dizaines de mètres plus loin, dans le rayon beurre et laitage, les producteurs ont apposé plusieurs stickers : par exemple des beurres de marques françaises très connues contiennent de la poudre de lait et/ou de la crème origine Union européenne. Dans les produits transformés, l’emballage des endives au jambon toutes prêtes revêt une belle mention avec le drapeau bleu blanc rouge : porc d’origine France. Mais en regardant de près la liste des ingrédients, le plat ne contient que 13,5 % de porc. La provenance des endives, elle n’est pas française… Les agriculteurs ne sont pas au bout de leur peine : dans le rayon viande, des pilons de poulet ont pour origine la Belgique alors que la PLV indique qu’ils sont français et de surcroît ils sont installés juste en dessous d’un rayon de produits régionaux ! Dans les fruits et légumes, les poires d’Italie ou du Portugal côtoient sans vergogne les fruits français. Même chose pour les salades qui viennent parfois de loin.

« C’est tromper le consommateur »

Au supermarché de Vindry-sur-Turdine, six éleveurs bovins et caprins se sont donnés rendez-vous. « On va regarder dans les rayons les produits étrangers parce que pour sauver l’agriculture française, il faut payer le juste prix », relatait Richard Bissuel, éleveur à Amplepuis, avant d’entrer dans la grande surface. À l’intérieur, viande, produits laitiers, fruits et légumes sont inspectés par les agriculteurs.

Devant le rayon des viandes, les agriculteurs restent perplexes : « On a une bandelette qui met en avant le porc français alors que le produit est né, élevé, abattu et découpé en Espagne. C’est tromper le consommateur », interpelle Mikaël Gonin, responsable de la filière laitière à la FDSEA 69. La responsable du rayon explique cet emplacement par « une faute d’un intérim ». Dans le rayon suivant, devant des plats préparés, les agriculteurs font un triste constat : « dans certains de ces plats, la viande n’est pas française. C’est noyé dans les autres ingrédients. Les créneaux qui se développent c’est de l’import », regrette-t-on. Plus loin, « le saucisson de Lyon », d’une « maison fondée à Lyon en 1903 » s’avère également trompeur. À l’arrière du produit et sur l’étiquette, nous pouvons lire « viande de porc origine UE ». Certains clients sont interpellés par l’action menée : « vous avez raison de le faire, on a encore des agriculteurs et ça fait du bien de les voir », partagent certaines. Après plus d’une heure d’inspection sous les yeux attentifs du vigile et de certains responsables de rayon, les agriculteurs décident de partir. « Ce n’était pas la première fois et ce ne sera sûrement pas la dernière… », partagent-ils.

Jeudi 21 novembre, plusieurs produits de toutes les filières agricoles vont être transmis à la sous-préfète : beurre, cardons, poulet, saucissons importés… Profitant de la session de la chambre d’agriculture, la FDSEA 69 et les Jeunes agriculteurs espèrent pouvoir interpeller.

Actions d’étiquetage de la Fdsea et des JA dans les grandes surfaces