Semons l’avenir
Une soirée-débat vue de l'intérieur

Depuis cette année, Semons l’avenir propose régulièrement des soirées débats suivies d’un buffet à base de produits locaux. À chaque fois, une poignée d’agriculteurs s’installent face au public, le cœur battant. Thierry Colombier, céréalier bio à Simandres est de ceux-là. Témoignage.

Une soirée-débat vue de l'intérieur

Thierry Colombier, céréalier en agriculture biologique à Simandres, a déjà pris le micro à deux reprises : à Saint-Genis-Les-Ollières en avril dernier et le 27 novembre à Saint-Symphorien-d’Ozon. Il estime en effet que c’est une occasion « de donner de vraies informations sur l’agriculture à nos concitoyens qui en reçoivent des masses de la part des médias mais trop souvent erronées. » Pour le céréalier, être mal vu par une partie de la population est difficile à vivre : « les produits phyto, le bruit, les odeurs, les problèmes de circulation… Les raisons de nous critiquer sont multiples. L’autre jour, j’épandais de la chaux calcique sur des terrains et un voisin m’a pris à partie. J’ai consacré un peu de temps à lui expliquer ce que je faisais et pourquoi et cela a permis de désamorcer les tensions ».

« Calme et pédagogie »

Même si prendre la parole devant des dizaines de paires d’yeux n’est pas facile, « les questions sont variées et parfois un peu pièges mais il faut y répondre avec calme et pédagogie et ne pas se laisser déstabiliser… », explique-t-il. Il a déjà reçu des élèves en formation agricole sur l’exploitation et a beaucoup apprécié ce contact. Il saisit la moindre occasion de parler des différentes facettes de son métier aux gens qui passent, à ses propriétaires, etc.

Le discours de plusieurs pages qu’il a préparé et lu lors de la soirée de Saint-Symphorien-d’Ozon est la preuve que les agriculteurs ont des choses à dire au grand public. Thierry s’est par exemple adressé aux « consomm’acteurs » en ces termes : « arrêtons de critiquer l'agriculture française qui est un modèle et qui a été élue la plus durable au monde mais bizarrement la plus critiquée par son peuple ». Il est également revenu sur l’histoire de l’agriculture. « Auparavant, un Français sur deux était agriculteur ; aujourd'hui, il n'y a guère plus de 1 million d'exploitants agricoles en France (…) Aucun autre secteur économique n’a connu une régression d’emplois aussi massive. Et l’agriculteur d’aujourd’hui doit s’adapter à cette situation, ce qui passe par des investissements souvent d’envergure et du matériel nécessaire pour s’adapter à cette pénurie de main-œuvre agricole… ». Autre extrait : « l'agriculture qui nous entoure est directement liée à notre alimentation. Si nous prenions tous l’initiative de manger local et de saison, nous n’aurions plus les problématiques liées aux aliments qui parcourent des kilomètres en bateau, avion ou camion, alors qu’il y a un producteur à notre porte ! ».

Pour Thierry Colombier, la communication se fait spontanément, même s’il avoue préparer quelques réponses à des questions potentielles. Il s’appuie aussi sur son passé d’artisan et ses expériences aussi bien en agriculture conventionnelle que biologique pour se mettre à la place du consommateur, novice en agriculture.

Pour l’instant, de sa courte expérience face au public, l’agriculteur a noté des retours positifs. « Dès la fin du débat, les gens viennent nous parler, poser d’autres questions. Certains nous félicitent et nous remercient de leur avoir appris plein de choses. C’est réconfortant. »

De l’avis de Thierry, « il faudrait toucher plus de jeunes consommateurs : les 30-40 ans et les adolescents par exemple qui ont peu d’occasion de rencontrer des agriculteurs ». 

En somme, c’est un véritable travail de fourmi qui demande un certain courage à ces passionnés qui vont au charbon pour défendre leur métier...

 

Emmanuelle Perrussel