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Hausse des charges : les filières durement impactées

Depuis de longs mois, le monde agricole subit de plein fouet l’augmentation généralisée du prix des matières premières. Dans les filières animales ou végétales, si certains s’en sortent mieux que d’autres, l’ensemble des professionnels sont impactés par la hausse du prix des engrais, de l’énergie, de l’alimentation ou encore des matériaux. Éléments d’analyse et retours de terrain pour comprendre ce phénomène conjoncturel majeur.

Hausse des charges : les filières durement impactées

Des projets de production d’énergies renouvelables (photovoltaïque…) émergent dans le monde agricole. Parmi eux, la méthanisation suscite un intérêt. Des agriculteurs de la plaine de Lyon ont en effet été contactés par des porteurs de projets et se posent des questions. Afin d’apporter une vue d’ensemble de ce procédé et de prendre le pouls localement, la chambre d’agriculture en collaboration avec GRDF et GRTgaz a invité des agriculteurs de l’Est lyonnais à une matinée d’informations sur le sujet, le 19 décembre à Mions.

Enzo Casnici, conseiller énergie et environnement à la chambre d’agriculture du Rhône a d’abord rappelé les grands principes de la méthanisation, à savoir la possibilité de traiter des déchets ou coproduits animaux et végétaux en vue de les valoriser pour produire de l’énergie.

Les substrats (matières destinées à alimenter le méthaniseur) ont diverses origines d’où l’intérêt de tenir compte, en plus de leur potentiel méthanogène et de leur rentabilité, de leurs impacts techniques, fiscaux, économiques et réglementaires. La réglementation diffère en effet selon le type et la quantité d’intrants. Une simple déclaration suffit pour moins de 30 t de déchets journaliers (jusqu’à 10 900 t/an), au-delà, il faut prévoir des démarches d’enregistrement jusqu’à 36 500 t par an puis des demandes d’autorisation à partir de 36 500 t annuelles. « La saisonnalité des intrants doit être pensée. D’autres gisements sont à prévoir pour combler d’éventuels déficits (cultures intermédiaires à valorisation énergétiques-Cive…). Il est par ailleurs primordial de sécuriser les substrats exogènes en termes de quantité et de qualité. L’intérêt est évidemment de produire soi-même le plus de matière possible », note Enzo Casnici.

Injection ou cogénération

Le process le plus répandu (90 % des méthaniseurs) est le système voie liquide infiniment mélangé. Le méthaniseur est alimenté régulièrement en substrat qui est continuellement brassé. Le biogaz produit est valorisé de deux sortes : soit en cogénération où le gaz est envoyé dans un moteur qui le transforme en électricité, soit en injection où le gaz est compressé et envoyé directement dans le réseau de distribution de gaz après épuration des autres gaz que le méthane. « Le biogaz est composé pour près de la moitié de méthane et pour l’autre moitié de dioxyde de carbone, il contient une petite part de souffre. Un méthaniseur ne pollue pas et ne risque pas d’exploser, contrairement aux idées reçues ! », précise Enzo Casnici.

Pour la cogénération, une petite partie de la chaleur produite est utilisée dans le process, le reste est donc valorisable (environ 35 %). L’électricité représente entre 35 et 38 % de la production ; son tarif de rachat, même s’il tend à baisser, est soutenu par l’État et garanti sur vingt ans. Laurent Rivollet, représentant GRDF, a précisé que sur 115 sites en France qui injectent du biogaz dans le réseau, 90 fonctionnent à partir d’effluents agricoles et de déchets agroalimentaires. Le tarif de rachat du biogaz, assuré pour quinze ans, tend à baisser aussi. Des débouchés se développent en gaz naturel pour véhicules. Globalement, en injection, 95 % de l’énergie produite est valorisée, le bémol étant les coûts d’investissement dans l’unité d’épuration qui nécessite une taille plus importante d’installation afin d’être amorti.

La valorisation du digestat doit elle aussi être soigneusement étudiée. La question du retour au sol et du stock de carbone dans ce dernier a par exemple été soulevée. Il faut en outre prévoir un plan d’épandage, du matériel spécifique d’épandage (pendillards ou enfouisseur), un espace de stockage pour plusieurs mois. Sans oublier la réglementation, notamment les distances d’épandage à respecter. Ce fertilisant naturel produit sur place et à moindre coût revêt aussi des avantages : apport en azote, phosphore et potassium, pH neutre à basique, bonne minéralisation de l’azote, conservation de la lignine, diminution des germes pathogènes et des graines d’adventices, il est quasiment inodore. Il est possible de séparer les phases liquides et solides et de d’utiliser en agriculture biologique sous conditions.

La matinée a aussi été l’occasion de présenter les différentes étapes d’un projet de méthanisation : études préliminaires (3 à 6 mois), études de faisabilité (3 à 6 mois), développement du projet (1 à 2 ans) et construction (1 à 1,5 an) et l’existence de subventions : Feader, Région, Ademe… L’acceptabilité sociétale a été abordée. Selon Laurent Rivollet, « la méthanisation est en général bien perçue, mais il ne faut pas négliger la communication. Aller voir les gens et leur expliquer est la meilleure option ».

 

Renseignements auprès d’Enzo Casnici, au 04 78 19 61 77 ou 06 30 03 79 27. Mail :
[email protected]
 

Emmanuelle Perrussel

Salon de l'agriculture : Les Retrouvailles

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Enzo Casnici a listé quelques avantages de la méthanisation : créer une nouvelle activité, financer une mise aux normes, économiser de l’engrais, diminuer les nuisances olfactives, rémunérer les Cive, fournir de l’énergie verte à son territoire…