Bière
Des champs à la bouteille personnalisée

Françoise Thomas
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La Dame de malt est l’une des nombreuses microbrasseries que compte le département. Le producteur en grandes cultures Philippe vacher en est à sa tête avec sa femme Sandrine. Ou comment une envie et une passion sont devenues progressivement l’une des activités à part entière d’une exploitation agricole.

Des champs à la bouteille personnalisée
Philippe Vacher et sa femme Sandrine se sont orientés vers les bières autant par intérêt pour le produit que pour diversifier leurs activités.

Située à Villette d’Anthon (38), l’EARL de L’Abbaye est à la frontière entre trois départements : l’Isère, le Rhône et l’Ain. Une singularité qui rajoute un peu de gymnastique intellectuelle en fonction des dispositifs en vigueur sur ces différents territoires dans un quotidien déjà bien rempli !
Succédant à sa famille et belle-famille, reprenant ainsi certaines de leurs terres et bâtisses, Philippe Vacher s’est installé au début des années 1990 avec sa mère et a essentiellement réorienté les productions vers les céréales. Puis par intérêt pour les bières et à la suite de la rencontre avec un brasseur basé dans les monts du Lyonnais, il a commencé à faire ses premières bières dans son garage. Après quelques années à se former sur cette production personnelle, « nous avons eu nos premières bières commercialisables en décembre 2012 ». À l’époque, la production des bières baptisées La Dame de malt reste modeste : « 10 hl, soit trois- quatre brassins par an ! ».

Gamme complète

Progressivement, les volumes s’intensifient et poussent à définitivement déménager l’activité de Meyzieu à Villette d’Anthon où deux fermenteurs officient désormais. « En 2016, c’est devenu pour nous une activité complémentaire, relate Philippe Vacher. Depuis, nous écoulons nos bières auprès de quelques restaurateurs, dans des magasins de producteurs, des épiceries et en vente directe ». Secondé par sa femme Sandrine, Philippe Vacher fait en effet connaitre ces bières en participant régulièrement à des foires et salons tout au long de l’année. Cependant, ils n’ont pu que constater un bouleversement dans les habitudes d’achat et de consommation depuis la crise Covid. « La vente est devenue compliquée et nous sommes descendus à 100 hl écoulés. Heureusement, en 2022 c’est reparti ». Actuellement, la Dame de malt, ce sont environ 150 hl de bière produits. La gamme comprend des classiques : blonde, dorée, blanche, caramel triple et impériale stout, plus quelques bières spéciales créées en fonction des envies et des idées du moment. On trouve aussi une bière IPA « super houblonnée ». « Nous avons aussi par exemple fait une bière de saison au moment des foins, présente le producteur. Nous voulions lui donner un caractère « d’antan » donc pour l’étiquette nous avons repris une photo de l’été 1933, une scène de batteuse sur laquelle mon père enfant est sur les genoux de sa grand-mère ». Dans la même idée de production spéciale, le couple a fourni les bières pour l’inauguration du nouvel aménagement du centre-village d’une commune de l’Isère « et nous avons pu personnaliser les étiquettes puisque nous avons l’équipement pour ».

Bientôt trois…

Évidemment, l’orge brassicole et le blé sont produits par Philippe Vacher. Celui-ci envoie son blé et son orge en Allemagne pour être maltés. Le houblon des bières de la Dame de Malt vient de Hollande, d’Allemagne ou des États-Unis selon la bière visée. Les drèches, les résidus du brassage des bières, sont amenées chez un voisin éleveur de vaches allaitantes et entrent dans leur alimentation.
Sur les 190 ha de l’exploitation, les cultures principales sont le blé, l’orge, le tournesol mais aussi des légumineuses, lentilles et pois chiches, vendus aussi en vente directe. « Une partie de notre production est passée en bio à partir de 2010 pour être certifiée deux ans plus tard. Nous avons produit en mix conventionnel et bio jusqu’en 2015 avant de tout passer en bio ». Leur fils Arnaud est salarié de l’exploitation depuis juillet 2022 mais « pour qu’il puisse s’installer avec nous, il va falloir intensifier nos productions et nous prévoyons notamment de produire plus de soja dès cette année ». Plus porté sur les grandes cultures, le fils du couple laissera ainsi plus de temps à ses parents pour produire davantage de bières et diversifier encore leur gamme. La partie commercialisation directe intéresse de toute façon particulièrement le couple qui prend plaisir à expliquer son processus de fabrication et s’amuse à tester différentes associations de malt et de houblons.