Élevage
Établir précisément ses besoins en eau

Françoise Thomas
-

En juillet dernier, Rhône terre d’éleveurs a proposé des rencontres dans des fermes autour de la problématique de l’autonomie en eau des élevages. Désormais, c’est un accompagnement concret et direct qui est proposé aux éleveurs. Entretien avec Jérôme Crouzoulon, l’intervenant, spécialiste de l’eau en élevage.

Établir précisément ses besoins en eau
La question de l’autonomie en eau mobilise de plus en plus les éleveurs. Rhône terre d’éleveurs (Rhône conseil élevage, le GDS et la chambre d’agriculture) propose un accompagnement personnalisé en 2024. ©FDSEA69

Les journées de formation que Rhône terre d’éleveurs propose début 2024 se sont construites à l’issue des journées de juillet autour de la gestion de l’eau en élevage. Quelles avaient été les principales remontées terrain de la part des éleveurs du Rhône venus y assister ?

Leur préoccupation principale est de gagner en autonomie, essentiellement pour l’abreuvement de leurs animaux. Vient ensuite le besoin en eau pour tout ce qui est lavage machine ou matériel. Gagner en autonomie est aussi important pour eux pour des questions financières puisque l’eau coûte de plus en plus cher et qu’elle représente un poste très important. Les Pouvoirs publics par ailleurs incitent justement les éleveurs à gagner en autonomie en rappelant que la priorité de l’eau du réseau public reste l’approvisionnement humain. 
En élevage, on pense bien évidemment à l’eau du sous-sol, à récupérer par des puits ou des forages. Mais il y a aussi l’eau de pluie qui peut notamment être récupérée depuis les toits des bâtiments. Pour cette eau-là, se posent alors plusieurs questions : comment la récupérer cette eau ? Comment la stocker ? Comment en garantir la qualité ?

Pourquoi avoir choisi de construire ces journées en deux temps ?  Une partie collective suivie d’une partie individuelle ?

Le temps collectif va permettre d’optimiser le temps en donnant un maximum d’informations pour que chacun puisse ensuite réfléchir à son propre projet. On va ainsi livrer les éléments pour savoir comment évaluer ses besoins par rapport à la taille du troupeau et aux autres usages, comme le lavage d’une salle de traite par exemple. Calculer ses besoins permet ensuite de les mettre en rapport aux ressources potentielles qui sont propres à chaque ferme. Certes il y a les puits et les sources, mais il faut aussi estimer la pluviométrie. Il s’agira donc de donner des éléments pour apprendre à déterminer les volumes à récupérer, stocker et traiter si l’eau doit être potabilisée pour être donnée aux animaux. Soit autant d’éléments de gagner au moment de passer au travail individuel. Cela permet à chacun d’aller au cœur du projet pour être ensuite plus efficace.

Jusqu’où ira la partie diagnostic individuel ?

L’idée est d’arriver jusqu’au niveau des plans et du chiffrage des besoins en volume et en capacité de stockage : dire ça j’ai, ça je n’ai pas et c’est nécessaire ; faire des demandes d'aides financières et de devis pour tout ce qui est matériel de récupération, de stockage, etc. ; et si possible, si nécessaire, mettre l’éleveur en lien avec des structures en capacité de répondre à son projet. Il est certain que plus le dossier en amont sera clair et précis, plus le ciblage des entreprises pourra être juste. La filière élevage peut être considérée comme du « semi-industriel » : les volumes à traiter sont beaucoup plus importants que pour des particuliers mais pas non plus d’un niveau industriel. Jusqu’il y a peu, il n’était pas évident de trouver des structures en capacité de répondre aux besoins des élevages. Mais depuis quelques années, on commence à y voir plus clair, avec des équipements répondant de mieux en mieux aux attentes du monde agricole.

Les journées de juillet dernier avaient-elles fait remonter une spécificité d’un département comme le Rhône dans cette problématique eau en élevage ?

Non pas spécialement, en revanche ce que l’on constate ici comme dans d’autres territoires c’est la prise de conscience, notamment des Pouvoirs publics, sur la nécessité de permettre aux éleveurs d’être plus autonomes. Cela passe par profiter de l’existant, donc par la récupération des eaux de pluie sur les toitures. Il faut bien avoir conscience que, récupérée dans de bonnes conditions, l’eau de pluie peut s’avérer plus intéressante que certaines eaux de sources car de meilleure qualité, donc plus simple à potabiliser. Certaines eaux en sous-sol peuvent en effet être très, trop, chargée en fer, en manganèse, etc. et les traitements pour entrer dans les normes peuvent être cher. 
Le Rhône ne présente pas de spécificités par rapport à tout ceci, mais ce que je retiens des journées de juillet, c’est la réflexion de l’un d’eux expliquant que s’il avait eu ces éléments en amont, cela lui aurait permis d’éviter certaines erreurs, qu’il est obligé de corriger maintenant.

Propos recueillis par Françoise Thomas

Les journées en pratique

La formation Être autonome en eau sur ma ferme se déroule en plusieurs temps. Les temps collectifs sont le jeudi 18 janvier pour les Monts du Lyonnais, de 9 h 30 à 17 h à Aveize ; le mercredi 7 février pour les monts du Beaujolais de 9 h 30 à 17 h à Cublize. Un accompagnement personnalisé sera proposé à l’issue de ces journées. Il s’agit d’une formation Vivéa.

Contact : Colin Duprés, conseiller eau à la chambre d’agriculture du Rhône, 06 42 71 95 61 – [email protected]

Jérôme Crouzoulon, l’intervenant sur les journées collectives et les diagnostics personnalisés, est spécialiste de l’eau en élevage. ©IAR /FT
Département

Le Département toujours mobilisé

Conscient de la problématique de l’accès à l’eau pour les éleveurs de son territoire, le conseil départemental du Rhône a mis en place plusieurs soutiens. Poursuit sa politique de soutien en impliquant ses partenaires.

Vendredi 1er décembre, l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse et la Banque des territoires signaient une convention partenariale avec le Département pour apporter leur soutien financier à hauteur de 212 000 € au diagnostic « Eau et Rhône, aujourd’hui et demain ». Cette étude stratégique vise à établir l’évolution de la ressource en eau du territoire au regard du changement climatique. Le diagnostic doit permettre de déterminer les besoins et les actions à mettre en œuvre. Les premiers éléments devraient être rendus courant premier trimestre 2024. 
Ce partenariat autour de « Eau et Rhône aujourd’hui et demain » vient en parallèle du Plan départemental ressource en eau des exploitations agricoles 2022-2027 qui permet de financer des investissements comme des puits ou des forages. Depuis 2019, 47 projets d’investissement ont pu être soutenu. Le plan est désormais doté d’une enveloppe de 600 000 € sur six ans.
Troisième initiative départementale en faveur de la ressource en eau, l’action pilote menée sur le territoire Brévenne-Turdine, aux 430 réserves d’eau, visant à identifier les retenues collinaires sans usage agricole qui pourraient être réutilisées par l’agriculture.

D’après communiqué