Prendre soin de la santé des femmes en agriculture

Ce n’est un secret pour aucun(e) exploitant(e), le travail agricole sollicite le corps et l’esprit. Chez les femmes, les risques sont amplifiés par des réalités physiologiques et sociales. Selon la MSA, 60 % des agricultrices souffrent de troubles musculo-squelettiques (TMS), liés au port de charges lourdes et aux gestes répétitifs. Les statistiques montrent aussi que les accidents du travail frappent particulièrement les femmes dans l’élevage, secteur très accidentogène.

À cela s’ajoutent des expositions accrues aux produits phytosanitaires. Des enquêtes de l’INSERM ont confirmé un risque plus élevé de cancers et de troubles de la fertilité pour les agricultrices.

La santé psychologique reste également un point d’alerte : près d’une femme sur trois déclare un stress chronique, et une sur dix suit un traitement anxiolytique. Des chiffres qui rappellent la nécessité d’un accompagnement adapté.

Des freins persistants dans la reconnaissance

Au-delà des risques physiques, de nombreux obstacles compliquent encore la vie des femmes en agriculture. Le statut professionnel est parfois absent, laissant certaines exploitantes invisibles administrativement. Les aléas familiaux (enfants malades, manque de services de remplacement) accentuent leur vulnérabilité.

À cela s’ajoutent des contraintes matérielles : des machines pensées pour des morphologies masculines, des horaires atypiques, et un éloignement fréquent des soins dans des territoires déjà fragilisés par les déserts médicaux.

C’est dans ce contexte que la MSA a publié, en 2024, un « livre blanc » des femmes en agriculture avec quinze propositions fortes. Parmi elles : faciliter des visites gynécologiques systématiques aux âges clés de la vie, développer des consultations itinérantes, renforcer le répit parental ou encore mettre en place un suivi spécifique pour les femmes enceintes exposées aux produits chimiques.

Solid’elles : des journées pour soi

Face à ces constats, la MSA Ain-Rhône propose une réponse concrète et conviviale avec les journées « Solid’elles ». Objectif : offrir un temps pour souffler, se faire dépister et s’informer.

Le programme est riche : dépistages gratuits (cœur, tension, diabète, cholestérol, souffle), rendez-vous avec des professionnels (dentiste, gynécologue, infirmière), ateliers pratiques (activité physique, alimentation, relaxation, gestes de premiers secours).

Ces rencontres sont ouvertes à toutes les femmes, qu’elles soient agricultrices, salariées agricoles, ou simplement habitantes du territoire. « Parce que vous êtes souvent là pour les autres, mais rarement pour vous », rappelle la MSA.

L’initiative s’inscrit cependant dans une stratégie plus globale : renforcer la prévention et éviter l’aggravation de pathologies souvent négligées par manque de temps ou d’accès aux soins. La santé des femmes n’est pas seulement un enjeu individuel, elle est aussi un vecteur de vitalité pour la famille et l’exploitation. Ces journées participent par ce biais à un mouvement plus large : reconnaître pleinement la place des femmes dans l’agriculture, en leur donnant les moyens de rester en bonne santé tout au long de leur parcours.

À travers « Solid’elles », la MSA rappelle ainsi que le bien-être des agricultrices n’est pas un enjeu secondaire, mais un pilier pour l’avenir du monde rural. Une façon de dire que, derrière les chiffres, il y a avant tout des femmes qui font vivre nos territoires, et que leur santé demeure une absolue priorité.

Rémi Morvan